Les Beatles à Hambourg : L’origine du Pub-Rock ?


(Les enregistrements Polydor, les enregistrements Star-Club)


Les enregistrements Polydor :

Les Beatles firent 5 voyages à Hambourg entre 1960 et 1962 pour y satisfaire des engagements musicaux. Les groupes anglais étaient alors très demandés par un public composé essentiellement de militaires américains occupant l’Allemagne défaite lors de la seconde guerre mondiale.

C’est en avril 1960 que les Beatles font leur premier voyage. Il faut se souvenir que le batteur était Pete Best, que Stuart Sutcliff tenait la basse et Paul McCartney la troisième guitare. Ils étaient également accompagnés d’ Alan Williams, leur premier manager (C'est le titre qu'il se donne lui-même). Ils devaient se produire pendant 4h30 (hors pose) à l’ Indra Club appartenant à Bruno Koschmider. C’est dans cette toute première période qu’ils font la connaissance d’un guitariste anglais qui prendra une importance primordiale pour leur carrière par la suite : Tony Sheridan.

L’Indra Club ferme le 4 octobre 1960 suite à des problèmes de voisinage. Les Beatles se retrouvent alors au Kaiserkeller, autre club de Bruno Koschmider, pour jouer en alternance avec Rory Storm And The Hurricanes (dans lequel officie Ringo Starr à la batterie). Le 1 novembre 1960, le patron du club transmet un avertissement des autorités relatif à l’age de George Harrison à l’intéressé. Celui-ci doit rentrer en Angleterre. Aujourd’hui, ce fait à tendance à être considéré de nos jours comme un prétexte utilisé par Koschmider car les Beatles profitent de leurs pauses pour aller voir Tony Sheridan au Top Ten (autre club réputé de la ville), ils vont même parfois jusqu’à le rejoindre sur scène. Tout ceci rajouté à l’épisode de l’incendie (très petit incendie, en fait) du mur provoqué , par jeu, par Paul et Pete fait que les Beatles se retrouvent expulsés d’ Allemagne , suite à une plainte de Bruno Koschmider, Ils ont néanmoins pris des contacts avec Peter Eckhorn patron du Top Ten pour un passage à venir.

C’est donc le 1/4/1961 que commence le deuxième voyage en Allemagne avec un contrat au Top Ten qui courre jusqu’au 2/07/1961. Tony Sheridan est alors chanteur vedette de ce même club, les Beatles ouvrant le spectacle. Le mélange se fait tout naturellement et ils prennent l’habitude d’accompagner Tony juste après leur passage. D’autant plus , qu’alerté par plusieurs de ses collaborateurs, le grand producteur Allemand Bert Kaempfert va se rendre plusieurs fois au Top Ten pour les écouter. Finalement conquis, il proposera un contrat d’enregistrement à Tony Sheridan et un autre aux Beatles. Tony Sheridan émettra par ailleurs le souhait d’enregistrer avec les Beatles.

Le contrat avec les Beatles est donc signé pour 1 an avec tacite reconduction à partir du 1/7/1961. Il est important que ce contrat ne lie pas les Beatles à Polydor mais à la société de production de Bert Kaempfert. De plus, ils apparaissent sous le nom générique de « Beat Brothers » ce qui provoquera par la suite, de nombreuses erreurs de crédits car les nom de « Beat Brothers » est utilisé par des line-up à géométrie variable. Polydor changera d’ailleurs radicalement sa politique par la suite afin de profiter de la Beatlemania, et pressera les rééditions sous le nom de Beatles, reléguant ainsi Tony Sheridan au rôle le plus petit possible, allant même jusqu’à le faire disparaître. Polydor surfera sur cette vague pour vendre des millions de disques sous diverses formes : Double Lp, Lp, Ep, 45 tours. Inutile de préciser que l’affaire se révélera très rentable.

(Avant de rentrer dans les détails des titres enregistrés qui sont au nombre de 8 rappelons le, répondons à la question évoquée plus haut : Comment remplir un double lp avec seulement 8 chansons ? Polydor utilisera , en entretenant la confusion, voir la tromperie, des titres enregistrés avec Tony Sharidan et d’autres « Beat Brothers ». Si Polydor est parfaitement consciente des tripatouillages destinés à faire croire que certains titres sont interprétés par les Beatles, voir même que Sheridan fait partie des Beatles, il n’en sera pas le cas des nombreuses licences vendues par Polydor et bien d’autres maisons de disques subalternes commercialiseront les « Beat Brother » en rajoutant l’ignorance à l’appât du gain. Cela donnera naissance à de nombreuses éditions plus ou moins curieuses mettant en avant le nom Beatles à mauvais escient.


Les Beatles enregistrent 7 titres les 22 et 23 juin 1961 :


Why, My Bonnie, The Saints, Cry For A Shadow, Ain’t She Sweet, Nobody’s Child, Take Out Some Insurance Baby. Le premier single (The Saints, My Bonnie) se classe septième dans la région de Hambourg et trente deuxième au niveau national en Allemagne. Une deuxième séance aura lieu mai 1962 afin de clore à l’amiable le contrat unissant les Beatles (via Brian Epstein) et Bert Kaempfert. Les titres enregistrés seront : Sweet Georgia Brown et Swanee River. Il est à noter , que là encore, des changements imposés par Polydor vont encore entretenir des confusions. Sweet Georgia Brown fut précédemment enregistrée par Tony Sheridan sans les Beatles

Mais revenons à la séance Sweet Georgia Brown et Swanee River. Le connaisseur , que vous êtes sûrement, rétorquera qu’il n’a jamais entendu Swanee River par les Beatles ! Et pour cause, on ne sait pour quelle raison, la sortie du 45 tours qui devait en sortir de support fut annulé. La version que l’on peut entendre sur certains disques « Polydor » est une version enregistrée par Tony Sheridan avec les Beat Brothers dans laquelle aucun Beatles n’est présent ! Il est fortement probable que nous n’entendrons jamais la version des Beatles, elle fut probablement détruite par Kaempfert, insatisfait du résultat. Les archives Polydor ont été fouillé et celles de Bert Kaempfert détruites dans un incendie. Les chances de voir réapparaître ce titre cinquante ans après sont donc malheureusement très faibles, mais si ce jour arrive, ce sera un nouveau moment de bonheur, probablement.

Il existe dans les archives Polydor un document évoquant une troisième séance d’enregistrement avec , cette fois ci, uniquement les Beatles et pour 12 titres. Cette séance est planifiée pour les 28 et 29 mai 1962. Curieusement prévue après la fin du contrat avec Bert Kaempfert, les séances n’eurent jamais lieu. Qu’avons nous manqué ?

Les enregistrements Star Club :

En 1977, la firme Lingasong sort un double LP : Live At The Star Club. Ces disques contiennent des chansons interprétées par les Beatles lors de leur passage du 00/00/0000. C’est Adrian Barber, membre du groupe anglais Cas And The Casanovas (Qui deviendra plus tard The Big Three) qui assure l’enregistrement. Il est à peu près certain que le disque tel qu’il sort est un montage de trois sets enregistrés les 25, 28 et 30 décembre 1962. Bien entendu la sortie de ce disque va donner lieu à une immense bataille juridique entre Apple et Lingasong dont le premier jugement (précédant la sortie) du 6/04/1977 rejettera la demande d’interdiction de commercialisation demandée par Apple. C’est donc le 8/04/1977 que 26 chansons sont commercialisées en Allemagne par la firme Bellaphon. Le 13/06/1977 le disque est publiée aux Etats-Unis avec 4 titres supplémentaires, puis partout dans le monde par l’intermédiaire de licences. Ces mêmes licences entraînèrent des « tripatouillages » supplémentaires avec des coupes dans les parties parlées, avec des repiquages à partir du Lp et non du master, avec des modifications dans l’ordre des chansons et dans leur nombre. Tout ceci ayant été précédé par une accélération de la bande d’origine par la firme Lingasong, par la suppression de certains solos et par le montage de chansons à partir de plusieurs sources (certes issues des sessions Star-Club). Pour terminer cette partie, on peut déplorer également la sortie de certains disques comportant la présence de Hully Gully interprétée par Cliff Benett And The Rebel Rousers ! Bref, un grand n’importe quoi.

Le 8 mai 1998, la justice anglaise , après un nouveau procès, donne cette fois ci raison à Apple et donc aux Beatles (John Lennon étant représenté par Yoko Ono) et interdit ainsi à Lingasong de commercialiser le Cd (la technologie ayant évolué depuis l’origine de l’affaire) et de restituer les enregistrements. C’est donc à partir de cette date que les enregistrements du Star-Club vont basculer définitivement dans le domaine du disque pirate.

Revenons au contenu, il est à peu près certain que les chansons au complet présentes sur les bandes d’origine (donc y compris les chansons non interprétées par les Beatles) devraient se présenter de la façon suivante :

Set 1 du 25/12/1962 :

1) Be Bop Alula
2) I Saw Her Standing There
3) Hallelujah I Love Her So
4) Red Hot
5) Sheila
6) Kansas City/Hey Hey Hey Hey
7) Shimmy Like Kate
8) Red Sails In The Sunset
9) Ask Me Why
10) I' m Gonna Sit Right Down And Cry
11) Twist And Shout
12) To Know Her Is To Love Her
13) Mr Moonlight
14) A Taste Of Honey
15) Falling In Love Again
16) Talking About You
17) Roll Over Beethoven
18) Long Tall Sally
19) I’m Remenber You

Set 2 du 28/12/1962 :

1) Sweet Little Sixteen
2) A Taste Of Honey
3) Till There Was You
4) Where Are You Been All My Life
5) Lend Me Your Comb
6) Your Feets Too Big
7) Talking About You
8) Besame Mucho
9) To Know Her Is To Love Her
10) Everybody’s Trying To Be My Baby
11) Matchbox
12) Little Queenie
13) Nothin’ Shakin
14) Roll Over Beethoven


Set 3 du 30/12/1962

1) Road Runner
2) The Hippy Hippy Shake
3) A Taste Of Honey
4) Money (Interprétée par Bobby Thompson)
5) Remmininscing
6) Ask Me Why
7) I Saw Her Standing ThereP
8) Beautiful Girl (Interpretée par Sam Hardie)
9) Lovesick Yodel Blues (Interprétée par John Frukland)
10) My first Taste Of Love (Interprétée par Bobby ThoPmpson)
11) Dizzy Miss Lizzy (Interprétée par King Size Taylor)
12) Do You Beleve (Idem),
13) (Idem)
14) Twist ans Shout (Idem)

15) Inconnue

Etudions maintenant le contenu plus en détail ainsi que l’interprétation. Tout d’abord le son : Evidemment, nous pouvons le qualifier de « faible qualité » et il y a des hauts et bas en fonction des labels. Nous pouvons comprendre aisément la volonté farouche d’ Apple de ne pas diffuser ces enregistrements. Les novices, attirés par les Beatles et achetant ce live pourrait en rester là, nous sommes vraiment loin de Sgt Peppers ou Abbey Road. La part belle est donnée au Rock and Roll et principalement à Chuck Berry et Carl Perkins. Un Rock sec, brut, ciselé à coup de Rickenbacker. Dans ces conditions, nous avons donc dans les mains un des premiers enregistrements de Pub-Rock au sens premier du terme (musique que l’on joue dans un pub…) Les Beatles y déploient une énergie convaincante et une cohésion deja remarquable. Ils alternent parfois une chanson plutôt lente pour reprendre encore plus sèchement. Nous avons également les premieres versions enregistrées de chansons que nous retrouverons plus tard sur les disques Emi/Apple comme I Saw Her Standing There, Kansas City, Ask Me Why, Twist And Shout , Mr Moonlight, A Taste Of Honey, Roll Over Beethoven, Long Tall Sally, Till There Was You, Everybody’s Trying To Be My Bany, Matchbox. Preuve s’il en était besoin ne partaient pas dans l’inconnu lorsqu’ils enregistrèrent leurs premiers disques « officiels ».

Personnellement, j’ai toujours eu une tendresse particulière pour ces enregistrements (Polydor ou Star-Club) et j’ai toujours cherché à me procurer des Cd les présentant. Je vous propose d’en découvrir quelques uns présentant des valeurs aléatoires.

Ce dossier à été rédigé à partir de documentations personnelles et également à partir du très complet livre d ‘ Eric Krasker : Les Beatles 60/62 : Enquête sur un mythe que je vous invite à vous procurer si vous désirez en savoir bien plus. Un grand merci également à Jean Claude Hocquet. Voici deux personnalités avec qui j'ai pu découvrir que je n'étais pas le seul à m'intéresser à la période Hambourg. Un hommage particulier au site Yellowsub.net sans qui rien ne serait arrivé.


 

Collection Personnelle

     

ATLAS RK CD 400

COFFRET BEAR FAMILY

COLUMBIA 46899502

     

ENTERTAINME 74398

FLASH 103

HALLMARK 305492

     

INTENSE 222273 205

POLYDOR 549268 2

POLYDOR 982132 3

     

SPECTRUM 550 0372

SPECTRUM 550 0372 (2)

SPECTRUM 551 4872

     

TECP 28435

WORLD STAR COLLECTION 002034

COMPILATION TONY SHERIDAN 589 084 2

HALLMARK 712 572

 

 

 

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© Francis Lachet